OUMOU SY  OTAGE DE LA DIPLOMATIE INTERNATIONALE ?

 

Chronologie d’un déni de justice et d’une séquestration abusive

 

Le 1er Septembre 2001, se déroule à Tripoli, Libye, lors du 32e anniversaire de l'accession au pouvoir de Kadhafi, un défilé de mode africaine avec des centaines de mannequins venus de nombreux pays du continent.

Les mannequins sénégalais ne sont pas présents, retenus par la gendarmerie de Dakar et Oumou Sy sous les verrous depuis le 30 août.

 

Août 2001 – Les soeurs Campbell contactent Oumou Sy et son Agence Macsy pour organiser un casting de 100 mannequins en vue des cérémonies du 32è anniversaire de l’accession au pouvoir du Colonel Khadafi, à Tripoli, le 1er septembre 2001.

 

Oumou Sy négocie avec les sœurs Campbell, cachets, transports, hébergement, prise en charge des mannequins, durant les 6 jours prévus à Tripoli. Sa rémunération est une commission pour l’Agence Macsy dont un acompte est versé la veille du départ programmé.


Oumou Sy impose d’effectuer le voyage et le séjour avec les mannequins, de sorte de veiller avec son équipe, composée de deux de ses enfants, sa secrétaire et des élèves de son école, les Ateliers Leydi, au bon déroulement des choses.

 

Mardi 28 août - Les sœurs Campbell convoquent les mannequins à l’aéroport. Les danseurs de Thionk Essyl, les artisans du Village de Soumbedioune, le Président de la Chambre de Commerce, tous munis de visas délivrés par l'Ambassade de Libye les rejoignent.
 

L’opération est classique. L'Ambassade de Libye au Sénégal est impliquée dans l'organisation et le voyage s'effectue par avion spécial Libyen. Le chargé d'affaires de l'Ambassade de Libye, intérim de l'Ambassadeur de Libye en vacances, est présent à l'aéroport.
 
Le fait que les mannequins partent sans visas ni titres de transport n’est pas sujet d'inquiétude. Jusque la veille du départ, la liste définitive a évolué. Lors de tels voyages officiels, les visas sont souvent délivrés à l'arrivée. Les visas de sortie du territoire ne sont pas nécessaires

La gendarmerie considère l’avion comme clandestin, sans autorisation d’atterrir, sans plan de vol et suspecte le détournement des mannequins par un réseau international de proxénétisme dans lequel seraient impliquées les sœurs Campbell et Oumou Sy leur complice

 
Les mannequins, Oumou Sy, les sœurs Campbell, l'équipage de l’avion sont interrogé dans différents commissariats puis relâchés, sauf l'équipage et les sœurs Campbell gardés à vue.

 

Oumou Sy accorde aux radios des interviews pour remercier la gendarmerie de son efficacité.


L’AFP est orientée par la gendarmerie dans la fausse piste de l’amalgame mode/ prostitution, mannequins/proxénétisme sans citer Oumou Sy. La presse écrite ajoute son nom et en fait ses choux gras dans l'édition du mercredi 29 août au matin

Mercredi 29 août - Les mannequins et Oumou Sy répondent à des interrogatoires et restent libres. La garde à vue de l’équipage de l’avion et des sœurs Campbell se poursuit. 

Les journalistes analysent et tempèrent. L’AFP parle de « présumé » réseau de proxénétisme.

 

Le Ministre sénégalais des affaires étrangères s'indigne et le gouvernement libyen s'excuse en regrettant que le nom d'une styliste de renom soit sali par cette affaire

Il est permis de penser l’incident est clos et que l'enquête va suivre son cours :


Le Ministre de l'Intérieur lance un communiqué réaffirmant le lien de l'affaire avec un réseau international de proxénétisme et annonce qu'il en a saisi Interpol, sans plus de détails.

Jeudi 30 août – L’équipage est libéré. L’avion clandestin repart officiel avec 52 personnes dans un Boeing 727 : les danseurs de Thionk Essyl et des artisans de Soumbedioune.


Cet avion dispose bien d’un plan de vol et d’une autorisation d’atterrissage. A son arrivée, les services de sécurité ont effectué les visites d’usage. Documents disponible à l’Aviation civile.

 

Ceux qui ont bloqué l’avion et l’ont laissé repartir détournent l’attention de la presse et de l’opinion publique vers Oumou Sy convoquée le même jour à la DIC à 11h du matin. Elle est interrogée pendant une heure puis retenue sans explications toute la journée et toute la nuit.

 

La garde à vue des sœurs Campbell est prolongée de 24h.

 

Vendredi 31 août – Le silence des Ministres des Affaires Etrangères et de l’Intérieur sur le départ officiel de l’avion clandestin libyen focalise l’attention de la presse et de l’opinion publique sur l’amalgame mannequins/proxénétisme/Oumou Sy et sa garde à vue « inavouée »

 

Les premiers messages de soutien tombent. L’opinion publique n’est pas dupe et réagit.

 

Oumou Sy est déférée au Parquet. Le Juge l’inculpe de complicité de proxénétisme en pleine confusion: sans preuves; de simples rumeurs; la pression des médias, l’incident diplomatique, un réseau de proxénétisme international; désinformé de l’épisode de l’avion libyen.

 

Samedi 1er septembre - Inculpé ne veut pas dire coupable. Pourtant, dans l’opinion publique, cela signifie Oumou condamnée. L’émotion est grande. Questions et interrogations fusent.

 

Oumou Sy passe la première nuit de sa vie dans une maison d’arrêt, le Camp Pénal, à Dakar.

 

Les sœurs Campbell sont déférées en même temps, inculpées de proxénétisme.

 

Dimanche 2 septembre – Youssou Ndour accorde une interview radio et presse écrite de soutien à Oumou Sy.  La communauté culturelle sénégalaise se mobilise.

 

La presse internationale couvre les cérémonies du 32è anniversaire de l’accession au pouvoir de Khadafi du 1er septembre avec photos à l’appui du défilé de mode africaine auquel  une vingtaine de pays africains ont participés, soit, au cumul, quelques centaines de mannequins

 

Lundi 3 septembre - La presse reprend les informations du défilé de mode de Tripoli et les témoignages de la communauté culturelle sénégalaise Youssou Ndour, Baaba Maal, Wasis Diop, Ousmane Sow, Sembene Ousmane, Germaine Acogny, Hamidou Dia, Alioune Badara Gueye, Moussa Touré, Demba Dia, Vivianne Ndour,…..  .

 

Le juge ne reprend pas comme prévu l’audience avec Oumou Sy. L’Etat prend le micro et menace de rompre les relations diplomatiques entre la Libye et le Sénégal.

 

Mardi 4 septembre – L’affaire prend un tour diplomatique et politique, mais Oumou Sy est toujours sous les verroux et attend la poursuite de son audience

 

La  presse publie un document de la République Populaire Arabe de Lybie, adressé au Pdt de la Chambre de Commerce du Sénégal, informant de l’intention de présenter des mannequins du Sénégal lors d’un défilé de mode africaine à Tripoli au 32e anniversaire de l’accession de Khadafi. Lettre datée du 15 août. Les autorités sénégalaises étaient donc bien au courant.

 

Les femmes de la Médina, font un sit-in silencieux et digne,  sous les fenêtres du Juge.

 

Mercredi 5 septembre – La presse confirme : l’avion libyen est un avion officiel avec plan de vol/autorisation d’atterrissage et s’interroge sur la nécessité d’un Boeing 727 pour le seul transport de 52 personnes (les artisans de Soumbedioune et les danseurs de Thionk Essyl).

 

Le Juge convoque les sœurs Cambell qui parlent de leur mandat de la République Populaire Arabe de Libyie de sélectionner en coordination avec la Tv libyenne, 100 mannequins sénégalais pour les cérémonies de Tripoli, d’où le contrat de Oumou Sy et son agence Macsy.

 

La presse internationale enquête sur l’affaire. Les premières réactions sont analogues aux réactions nationales. Personne ne comprend l’implication de Oumou Sy.

 

Jeudi 6 septembre –La presse reprend le fax de soutien de la célèbre chanteuse France Gall. Des personnalités du monde francophone constituent un Comité de Soutien International.

 

Le juge reçoit Oumou Sy. Aucune charge n’est révélée. La présomption de proxénétisme repose sur des coups de téléphone anonymes. La liberté provisoire est demandée.

 

Le Tribunal est investi par des manifestants silencieux aux réactions citoyennes relatives à la liberté individuelle. Des affiches pour la libération de Oumou Sy couvrent les murs de Dakar

 

Vendredi 7 septembre -  La pression nationale et internationale s’accentue. Des pétitions circulent. Le comité de soutien international couvre les cinq continents.

 

Samedi 8 septembre – La TV nationale diffuse un spécial Oumou Sy, rappel de l’apport de la styliste au Sénégal et à  l’Afrique.

 

Dimanche 9 septembre -  Les milieux de l’opposition pointent la légèreté du gouvernement.

 

Un haut dignitaire religieux et influent monte une mission spontanée en Libye qui conclut à la nécessité de faire des excuses à Oumou Sy, aux sœurs Campbell et aux mannequins.

 

Lundi 10 septembre – La justice est muette. L’Etat.annonce l’arrivée d’émissaires libyens.

 

Le cinéaste Cheikh Oumar Sissoko est à Dakar spécialement pour soutenir Oumou Sy.

 

Mardi 11 septembre - Les émissaires libyens rencontrent les ministres sénégalais des Affaires Etrangère et de la Culture. Le Ministre de l’Intérieur ne participe pas à la réunion.

 

Le communiqué commun affirme les relations d’amitié Sénégalo-Libyenne. La mention d’un complot justifie insidieusement l’incarcération de Oumou Sy et des sœurs Campbell.

 

Aucune allusion à un réseau de proxénétisme international dont la réalité se confirme de plus en plus imaginaire. Aucune allusion à l’avion clandestin à l’arrivée et officiel deux jours après

 

Oumou Sy est incarcérée sur le seul chef de complicité de proxénétisme. Aucune allusion dans le dossier judiciaire à un complot diplomatique et politique

 

D’aucuns considèrent ce communiqué comme une ingérence de l’Etat dans le processus judiciaire en publiant des conclusions alors que l’instruction judiciaire est toujours en cours

 

Le rôle de bouc émissaire de Oumou Sy se précise et d’aucuns supputent le déni de justice.

 

Mercredi 12 septembre. La confrontation entre les sœurs Campbell et Oumou Sy n’apporte rien. La confrontation avec des mannequins, présentées comme témoins à charge se traduira en décharge. Le dossier est décidément vide. L’avocate parle de non-lieu pour Oumou Sy.

 

Jeudi 13 septembre. Le Juge lance une enquête de moralité des 100 mannequins.

 

Vendredi 14 septembre. La réponse à la demande de liberté provisoire tarde.

 

Samedi 15 septembre. Le Théâtre de la Venerie, haut lieu culturel, présente à Bruxelles sa saison 2001/2002 à un parterre très officiel. Un hommage est rendu à Oumou Sy qui s’est produite lors du fameux «Nanga Deff». Le souvenir est encore vivace et l’émotion intense.

 

Dimanche 16 septembre.  Journée de mobilisation pour la libération de Oumou Sy

 

Lundi 17 septembre. Les services courriers de la Présidence et du Ministre de la Culture rejettent les messages de soutien du monde entier sous prétexte qu’il y en a trop

 

Mardi 18 septembre. La réponse à la demande de liberté provisoire traîne étrangement

 

Mercredi 19 septembre. Le dernier vol pour Stuttgart est le soir même, seul moyen pour Oumou Sy d’être à temps au vernissage de l’exposition que la Gallerie Ifa  lui consacre

 

Le préjudice à l’égard de Oumou Sy, déjà considérable, risque de s’étendre à un scandale international, suivant l’attitude et la réaction des autorités allemandes, des responsables culturels de Stuttgart, de la Gallerie Ifa, sans parler de l’opinion publique et de la presse.

 

Un préjudice pour le Sénégal et l’Afrique. Comment expliquer qu’une artiste ne puisse inaugurer une exposition qui lui est consacrée à l’étranger, sous prétexte que son Etat sur de simples rumeurs l’a confiée à la justice qui l’a inculpé de complicité de proxénétisme.

 

Jeudi 20 septembre. A Stuttgart, les stylistes Alphadi et Joel Andrianomerisea rendent un vibrant hommage à Oumou Sy devant le public, les officiels allemands et la presse.

 

A côté de Genève, les Journées de Ferney-Voltaire présentent dans une salle comble, «Baobab», de Laurence Attali, interprété par Oumou Sy, qui devient le thème du débat.

 

Ironie du sort septembre 2001 voit Oumou Sy, indépendamment de l’affaire, à la une de la presse internationale, photo et dédicace dans Paris-Match (du 5 septembre) dans le spécial France Gall, 7 pages dans l’enquête « Die Engel der Medina » qui lui est consacrée dans Focus (3 septembre), 8 pages dans le dossier que lui consacre Brigitte (19 septembre).

 

Vendredi 21. Samedi 22 et Dimanche 23 septembre. La mobilisation internationale se renforce et s’amplifie jusqu’à des interventions diplomatiques

 

Lundi 24 septembre et Mardi 25 septembre. Le dossier reste bloqué et la justice muette.

 

Mercredi 26 septembre. La demande de liberté provisoire est refusée. Stupéfaction générale.

Les attendus du refus sont sans rapport avec l’inculpation de Oumou Sy. :

-         la délégation judiciaire relative à l’enquête sur les sœurs Campbell

-         l’audience du chargé d’affaires de l’Ambassade de Libye à Dakar

-          les informations relatives à l’avion clandestin puis officiel libyen

 

Jeudi 27 septembre. La presse reprend l’information selon laquelle le Pdt Wade, interpellé à Genève, a répondu qu’il va s’occuper personnellement de l’affaire.

 

Vendredi 28 septembre. Le Juge interroge à nouveau les sœurs Campbell. Le dossier de police sur la moralité des mannequins est vide. Il n’y a aucune prostituée réelle ou virtuelle.

 

Lundi 1er Octobre. Le Juge convoque Oumou Sy le lundi 1er octobre pour lui accorder d’office, sans nouvelle demande des avocats, la liberté provisoire après 33 jours de détention..

 

D’aucuns s’étonnent que le rapport de police, ait mis 8 jours pour atteindre le bureau du Juge.

 

Mardi 2 Octobre. Oumou Sy sort du Camp Pénal dans une effervescence nationale et internationale proportionnelle au soulagement général.

 

Commence l’action pour sa réhabilitation et pour que toute la vérité sur l’affaire dite des 100 mannequins éclate. Une certitude semble unanime : « Plus Jamais Ca »

 

Une question reste : A qui  profite ce déni de justice à l’allure de séquestration abusive ?